C’est une adresse incontournable de la gastronomie sarthoise que nous vous avions présenté l’an dernier (Le Petit Sarthois n°55, p. 4). Un bistrot à vins pur jus, avec son ambiance d’époque, à deux pas de la place de la Rep’ au Mans. Damien Poumailloux a racheté il y a 4 ans cette extraordinaire cave créée en 1988. A l’époque Philippe Dreyer avait été l’un des premiers à ouvrir une cave au Mans, apportant le plus grand soin à sélectionner des vins rares et merveilleux, parmi les 65 000 exploitations viticoles que compte la France (source www.toutlevin.com – octobre 2022). Cultivant le fameux système des allocations (voir encadré ci-après) qui met en avant les vignerons plutôt que les appellations, Damien vous propose de choisir parmi 20 000 bouteilles stockées méticuleusement depuis bientôt 40 ans ! Et comme le courant est passé l’an dernier entre nous, que la page a bien marché (Damien a reçu plusieurs lecteurs du Petit Sarthois à sa cave), nous avons décidé de replonger avec délice dans les barriques de nos régions. Vous mettre le vin à la bouche, agrémenté de quelques conseils, vous proposer des références sympas pour tous les budgets, et comme d’habitude des recettes de grands chefs sarthois. Entrez… Laissez-vous guider… Carpe diem !
Une cave à nulle autre pareille dans la région
L’endroit est tenu secret, sécurité des grands crus oblige… «Nous avons une cave à quelques minutes de la boutique où reposent de grands Bourgogne comme du Gevrey Chambertin de chez Claude Dugat, des grands vins de la vallée du Rhône ou de grands Bordeaux comme Château Yquem (Sauternes) » Damien me met l’eau à la bouche et je lui demande un verre de blanc sec, il me débouche un Bourgogne Pernand Vergelesses, cépage Chardonnay : un blanc minéral, élégant vif et harmonieux. Il me raconte sa passion depuis très jeune «J’ai lancé ma cave personnelle vers 25 ans, achetant aux enchères de grands crus, j’ai toujours adoré déguster des bons vins». C’est tout naturellement que lorsqu’il a appris que Philippe Dreyer mettait en vente son trésor, ses yeux se sont illuminés. «Avec deux amis associés qui m’ont aidé à financer le rachat du stock (Emmanuel Pousset et Sylvain Ripoche), j’ai démarré ma nouvelle vie de rêve à 45 ans». Il faut dire que l’éventail de bouteilles est exceptionnel, avec de grands crus suivis chaque année via le fameux système d’allocations (voir encadré ci-après).
On commence par la Bourgogne : de l’importance des vignerons
Contrairement à la région du bordelais, les vignerons de Bourgogne sont accessibles pour les vendeurs spécialisés comme Damien. «Je rentre juste de 5 jours de tournée chez les vignerons de Bourgogne, nous avons pu gouter les millésimes 2023 et 2024. Pour 2025 nous les gouterons dans 6 mois directement dans les futs afin de pouvoir proposer des primeurs à nos clients pour dans 1 an et demi.» explique-t-il. Damien adore cette région richement dotée en vignerons talentueux. «Le nombre de propriétaires y est très important, c’est difficile d’y voir clair entre les appellations. Les cépages sont principalement le Pinot noir pour les rouges et le Chardonnay pour les blancs. Le Pinot noir permet de trouver tout ce qu’on aime dans le vin : la finesse avec des notes de petits fruits acidulés en début de gamme, ou plus de puissance et de profondeur sur le Cote de Nuit avec un potentiel de garde incroyable.

En Bourgogne, ce qui est prioritaire ce n’est pas l’appellation, mais plutôt le vigneron qui fait le vin. Beaucoup de clients viennent me voir en disant «Je voudrais du Gevrey Chambertin» mais cela ne veut pas dire grand-chose car cela ne garantit pas la qualité. Par contre, le nom d’un vigneron apporte une garantie. Par exemple nous avons une allocation avec Claude Dugat qui est un vigneron de talent. Ses grands crus sont recherchés dans le monde entier. Je préfère d’ailleurs un simple Bourgogne de chez Claude Dugat (48 € au Bar à Vin) à un Gevrey Chambertin d’un domaine totalement inconnu.»
La clé pour accéder aux meilleurs vins de Bourgogne : le fameux système d’allocations.
Damien poursuit la discussion avec un peu de géographie. «Il y a deux grandes régions en Bourgogne : la Côte de Beaune et la Côte de Nuits. Les plus grandes appellations on les trouve en Côte de Nuits : Vosne-Romanée, Gevrey Chambertin, Clos de Vougeot… En Côte de Beaune on trouve notamment les Pommard, Volnay, Aloxe Corton. Si tu n’es pas allocataire en Bourgogne, tu n’as pas accès aux Bourgogne les plus rares et les plus recherchés. C’est un peu comme la charcuterie Corse pour ceux qui connaissent ! Il faut dire qu’il y a une pression assez forte car la demande est élevée et une grande partie de la production part à l’export. Un vigneron de Bourgogne sort en moyenne entre 2000 et 10 000 bouteilles de Gevrey Chambertin. En comparaison, un château bordelais comme le Saint-Estèphe Lafon Rochet sort en moyenne 150 000 bouteilles par an !»
Pour pouvoir proposer au Bar à Vin une offre de Bourgogne à nul autre pareil dans la région, Damien arpente les vignobles deux fois par an. «On travaille depuis 25 ans avec le Domaine Lécheneaut, une référence dans la région. Pour les Côte de Nuit, nous avons le vin du Domaine Bart près de Marsannay. Encore un peu plus au sud se trouve l’appellation Côte Chalonnaise, et nous travaillons avec le château de Chamilly d’Arnaud Desfontaines. Nous avons fourni ce vin récemment à un mariage et les clients étaient ravis. Le cépage Pinot noir vieilli en barrique a beaucoup plu (millésime 2022, 16,50 € la bouteille au Bar à Vin).
Pour les Côte de Beaune, la référence c’est le Domaine des Croix – Il vient de prendre sa 3ème étoile à la Revue des Vins de France. Vous pouvez en acheter au Bar à Vin pour des prix allant de 50 à 130€ selon les appellations. C’est un vigneron exceptionnel qui pratique la technique de vendange entière – il n’égrappe pas, il met des rafles – cela apporte une pointe de fraicheur en fin de bouche. Ce qui est extrêmement intéressant pour les millésimes chauds que l’on traverse actuellement. Cela ne marque pas les vins et cela donne un tannin avec un grain extrêmement fin. Ses vins expriment des aromatiques de roses que l’on retrouve uniquement dans les plus grands Bourgogne.»
Les Bourgogne blancs : le fameux cépage Chardonay aux appellations mythiques
En buvant ce petit verre de vin blanc de Bourgogne, je bois du petit lait en écoutant Damien poursuivre ses explications par les blancs. «Les appellations mythiques en blancs de Côte de Beaune sont le Meursault, le Puligny-Montrachet, le Chassagne Montrachet, le Bâtard-Montrachet. Les Bourgognes blancs donnent des arômes de beurre frais, parfois des notes grillées comme la cacahuète! Et avec ce punch qui permet d’accompagner merveilleusement le foie gras de canard». Pour Damien, c’est une hérésie de proposer du moelleux pour le foie gras : «Un Bourgogne blanc, voire un Bordeaux Rouge un peu vieilli pour atténuer les tanins serait plus approprié.» Leprix d’un bon Bourgogne Blanc au Bar à Vin ? A partir de 20 € pour les petits domaines jusqu’à 80 € pour du Puligny Montrachet. En Côte Chalonnaise, Damien propose aussi des blancs exceptionnels entre 30 et 40 €. Par exemple un Rully de chez Dureuil Janthial ou dans le Maconnais les vins d’Éric Forest (élève de Guffens) de très grand blanc vers 45-50 € – «On peut même les laisser vieillir mais il faut leur éviter la lumière et les gouter régulièrement car ils peuvent s’oxyder surtout si le millésime provenait d’une saison chaude (2009, 2015) – dans ce cas les vins évoluent plus vite.» précise Damien.
Qu’est-ce qu’une allocation de vin ?
Si vous êtes amateurs de bons vins, vous vous apercevrez rapidement qu’il n’est pas facile de vous procurer certaines bouteilles. Généralement, si le domaine est réputé et qu’il ne produit qu’une petite quantité de vin chaque année, il y a des chances que ses vins soient en vente sous allocation. Damien Poumailloux nous éclaire : «Ce terme désigne un système de vente annuelle exclusive et renouvelable, mis en place par le vigneron, qui lui permet de choisir ses clients. Ceux qui peuvent se permettre d’adopter ce système avantageux sont des vignerons plébiscités par la critique. On retrouve ce cas de figure le plus souvent en Bourgogne : une région aux mosaïques de petits terroirs, aux productions limitées très convoitées dans le monde entier…»
Le Bar à Vin
3 rue du Cornet, Le Mans
02 43 23 37 31







