
Excepté en 2024 où il est remonté de 0,4%, le chômage a significativement baissé en France au cours de ces dernières années, du fait d’une dynamique de l’emploi portée par la croissance économique et d’une démographie favorable. Même si on compte plus de personnes en emploi, on compte aussi plus de personnes en chômage de longue durée, ou de travailleurs précaires (temps partiel subis, activité irrégulière sous le statut d’auto-entrepreneur). En parallèle, des pans entiers de l’économie sont en tension de main-d’œuvre et le seraient encore plus sans l’apport de salariés d’origine étrangère. Une situation qui s’aggravera dans les 5 ans à venir avec l’arrivée sur le marché du travail des générations plus creuses, nées après 2005. Plus que jamais, il faut accompagner la mobilité professionnelle et géographique, renforcer la formation continue pour aider chacun à changer de métier à tout âge de la vie, créer les conditions de l’emploi des seniors, développer la portabilité de tous les droits (chômage, mutuelle…) pour ceux qui changent de métier et de statut… L’équipe du Petit Sarthois est allée à la rencontre des acteurs de ce marché du travail en pleine mutation : politiques, entreprises, agences de recrutement, candidats à l’embauche, associations d’insertion professionnelle… La société se mobilise pour que l’offre et la demande d’emplois puissent « matcher », mais la partie n’est pas gagnée…
Un frein à la relance économique…
Quatre ans après le début de la crise sanitaire, le redémarrage à plein de l’économie place à nouveau les entreprises sarthoises face à une situation de pénurie de main-d’œuvre. Un frein à la croissance, estiment près de la moitié des dirigeants, selon les résultats de l’enquête réalisée par la Banque de France, dans le contexte de rattrapage synonyme de besoins grandissants. En début d’année, les employeurs sarthois interrogés par France Travail (Ex Pôle Emploi) formulaient des besoins en diminution de 8,7 points par rapport à 2023. Et la part des recrutements jugés difficiles par les entreprises est passée de 40,6% en 2020 à 55,3 % en 2024 souligne l’étude de France Travail. Ce taux de tension est très différent d’un bassin d’emploi à l’autre en Sarthe : 60,5% au Mans, et 37,6% à Sablé (voir carte ci-après).

L’offre de formations doit suivre l’évolution des métiers
Formateurs, nettoyage, aides à domicile, infirmiers et aides-soignants figurent parmi les secteurs les plus touchés par ces difficultés. L’un des leviers majeurs aujourd’hui pour recruter du personnel qualifié réside dans l’alternance, et de plus en plus d’entreprises forment en grande partie leurs futurs collaborateurs via cette filière. L’URMA Sarthe, devenue CMA Formation ouvre chaque année de nouvelles filières. Cette année un nouveau diplôme en boulangerie, le BM (brevet de Maitrise), forme les jeunes à la reprise d’établissement. Séverine Blanquez, directrice de CMA Formation adapte chaque année les cursus suivis aux évolutions de marché, et ça marche !
« 80% de nos élèves trouvent un CDD de plus de 6 mois ou un CDI en sortant de notre établissement» D’autres formations comme le CAP maroquinier en alternance à la MFR de Thorigné-sur-Dué, ou bien le BAC Pro Métiers du cuir du CFA Sainte-Catherine, ont vu le jour face aux besoins croissants de la filière (voir interview Toloméi page 11). Les services du ministère du travail ont enregistré 554 demandes de création de nouveaux centres de formation d’apprentis (CFA) en France, dont 61 émanant d’entreprises comme Schneider Electric, Arc International, ou Safran. L’État accompagne ces organismes, en payant une grande partie des coûts de formation, et en apportant une subvention aux entreprises qui recrutent (6 000 €) des alternants.
Une simplification des systèmes de formation professionnelle est nécessaire
Les raisons qui expliquent l’insuffisance de formation des demandeurs d’emploi sont parfois difficiles à comprendre. En effet près d’un sur deux souhaiterait bénéficier d’une formation alors qu’ils ne sont que 13% à en bénéficier 2. Dans un rapport publié le 16 septembre dernier, l’association SNC souligne justement combien « l’accès à la formation reste difficile pour les chercheurs d’emploi. L’Étude très complète de SNC décrit notamment un « paysage complexe » de formations présentant une grande variété de natures, d’objectifs, de durées et financées par une pluralité de structures – conseils régionaux, Pôle emploi, opérateurs de compétences, Agefiph – avec des conditions de mobilisation très diverses. Le nouveau compte personnel de formation (CPF) se révèle par ailleurs un dispositif mal adapté aux chômeurs, qui se retrouvent face à des dizaines de milliers de propositions, vantées par des organismes de formation en situation de concurrence. En outre, l’accès direct au CPF par Internet ou Appli mobile tend à marginaliser ceux qui sont en décrochage numérique. SNC propose donc de simplifier les démarches d’accès à la formation en recentrant le rôle de France Travail comme « interlocuteur clé » mais aussi de garantir la rémunération de la prise en charge des coûts de formation.

La marque employeur au cœur du recrutement
C’est un chef d’entreprise sarthois qui le dit : « Ce n’est plus nous qui recrutons, ce sont les candidats qui nous recrutent ». Les talents rares, les métiers en tension et une nouvelle génération moins encline à être fidèle à un seul employeur, le recrutement doit aujourd’hui être la continuité d’une stratégie de marque employeur. Voici alors quelques pistes à suivre pour lancer une marque employeur et une stratégie de recrutement. D’abord identifier ce qui fait de la structure un lieu de travail idéal pour les talents recherchés : localisation, cadre de travail, matériel, charte graphique, slogan, valeurs…… Il convient ensuite dépoussiérer les modes de communication et de cibler les supports correspondant aux profils recherchés. Et ne pas hésiter à être innovant. Troisièmement, ne pas oublier que les actuels employés sont les meilleurs ambassadeurs et pourquoi ne pas mettre en place un système motivant de cooptation. Qui dit salariés heureux, dit marque employeur attirante. Et pour les inviter à communiquer sur la structure et les futurs et actuels postes à pourvoir, un programme de recommandation de candidats est une technique qui a toujours fait ses preuves. Enfin, il conviendra d’organiser un parcours candidat sans faute. C’est sur le parcours candidat que la marque employeur joue le plus gros. À la moindre friction, le candidat peut décider de regarder ailleurs. C’est pourquoi il est tout particulièrement important de faire appel à des outils efficaces et complets. De la publication d’une annonce à la signature des contrats. À ne pas oublier : notifier les candidats éliminés avec un petit message original est une gageure. Un candidat ignoré un jour est souvent perdu à jamais.
(1) Données France Travail – juillet 204
(2)Étude 2023 de l’association Solidarités Nouvelles face au Chômage (SNC)