Journée découverte du métier de maroquinier

LE RÉEMPLOI AU CŒUR DU SITE EMMAÜS DE SAINT-JEAN DE LINIÈRES (49) 

François Terrien, l’architecte du projet

Alternative au schéma dominant dans le secteur de la construction “extraire, produire, consommer, jeter”, l’économie circulaire crée une boucle vertueuse en limitant l’extraction de matières premières et la création de déchets. Boosté par la loi Agec 1, le réemploi se développe et apparaît comme une solution viable face aux problématiques actuelles de coûts des matériaux et de difficultés d’approvisionnement. Mais il reste de nombreux freins à lever (esthétique, qualité, garanties…). La démarche est encore peu pratiquée mais nous avons rencontré un architecte de la région (Angers) qui a mené avec succès une réalisation qui s’est voulue exemplaire en matière de réemploi

Quelles sont les composantes du réemploi dans le projet du centre Emmaüs de St Jean de Linières ?

De nombreux matériaux ont pu être récupérés et intégrés dans un projet architectural de près de 2 000 m2. Le projet concernait une partie rénovation, et une partie construction. Pour le restaurant communautaire, l’entreprise de démolition Occamat a fourni un parquet en châtaignier tandis que les cloisons du centre Pierre Cointreau de la CCI de Maine-et-Loire ont servi pour les ateliers, tout comme les menuiseries en aluminium de l’Hôtel du département à Angers. Même des éléments structuraux comme les poutres en lamellé-collé issues de l’ancienne patinoire d’Angers ont trouvé une nouvelle vie.

Comment vous est venue l’idée de réemploi dans un contexte appel à concours d’architectes ?

Lors du concours, j’ai proposé au jury les racines des Compagnons d’Emmaüs. L’abbé Pierre avait recueilli deux vagabonds aux origines de l’association, et les avait chargés d’une mission de collecte et de revalorisation de rebus en ayant en tête l’analogie avec les sans-abris, comme une résilience très symbolique d’eux-mêmes. Le cœur du projet était donc le réemploi, mais l’intérêt du chantier passait aussi par l’utilisation de matériaux biosourcés, par la place accordée aux énergies renouvelables (bois, paille, photovoltaïque et géothermie), par une gestion optimale des déchets de chantier et un large recours aux chantiers d’insertion et chantiers participatifs avec des bénévoles encadrés par des professionnels.

Avez-vous connu des freins à mener un projet si novateur ?

Étant donné la rareté des ressources réemployables, on a commencé par composer le projet comme une grille d’improvisation d’une partition de jazz : d’abord dimensionner les parties à rénover et prendre des hypothèses de réemploi – simultanément on a lancé une sorte de « cueillette » des bardages, portes, fenêtres…. en parallèle de l’instruction administrative du projet. Évidemment il y a eu des marches arrière quand la collecte ne trouvait pas les pièces du puzzle… Aussi, les entreprises retenues ont parfois été celles qui apportaient les ressources du réemploi, par exemple pour les cloisonnements des ateliers. Autre point de vigilance complexe, la difficulté à obtenir les garanties sur les produits réemployés… Mais au final, ce projet a atteint ses objectifs : un lieu de vie moderne et agréable, preuve de la possibilité de changer notre logiciel et atteindre les standards de qualité dans un contexte de préservation de l’environnement.

1 : En 2020, la loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec) approfondit le diagnostic déchets mis en place en 2011, qui devient Diagnostic produits-équipements-matériaux-déchets (PEMD). En 2022, la RE 2020 introduit le recours à l’analyse en cycle de vie dynamique avec une méthode de calcul favorable aux matériaux de réemploi.

Bruno Réchard

Bruno Réchard, rédacteur en chef du Petit Sarthois

Journée découverte du métier de maroquinier

Nous suivre

Vous aimez la Sarthe ? Alors vous aimez le Petit Sarthois… Suivez-nous ;-)

PUBLICITÉ